Si une action ou une attitude ont pour objet notre profit personnel, elles sont entachées d'égoïsme et de sentiment possessif. Elles ne peuvent donc être conformes à la vérité et à la réalité qui comprennent mais dépassent notre personne. L'intérêt personnel, l'amour excessif de notre corps ou de nos possessions faussent notre vision du réel.
La pratique de la véracité, de la sincérité, de la rectitude, du courage, de la politesse, de la bonté, de l'amitié, de la gratitude, de la loyauté vident notre nature de l'attachement au corps et aux possessions. Alors, la dévotion à la vérité nous habite et prend toute la place. Les calculs, seulement personnels, ne peuvent plus prendre naissance. Le samouraï, le chevalier, sont les serviteurs de ce qui soutient et développe l'humain dans l'humanité. C'est pourquoi leur action est gratuite pour la Vérité et pour la Beauté.
L'emblème du samouraï est le Sakura, fleur du cerisier Japonais, qui s'ouvre pour la seule beauté, et ne produit pas de fruits. Quand elle a délivré son message de beauté, elle tombe et meurt. Elle est le symbole du désintéressement total.
Les Maîtres en Orient, que ce soient des Maîtres d'Arts Martiaux, d'autres Arts traditionnels, ou des Maîtres de Sagesse, enseignent gratuitement, parfois ils logent et nourrissent leurs disciples. Ces derniers, à leur tour, servent leur Maître dans toute leur vie domestique, attendent patiemment son enseignement et lui obéissent totalement, en toutes choses. Le Maître choisit ses disciples, accepte ou non les candidats. Ce que le Maître ne peut se payer, " n'a pas de prix ", la valeur en est inestimable. " Mes parents m'ont donné un corps et une éducation, mon Maître a fait de moi un homme ". Seule une gratitude infinie peut équilibrer un don illimité. Souvent, plus tard, le disciples met aux pieds de son Maître le meilleur de ce qu'il possède et parfois de véritables fortunes. Le Maître utilise ces dons pour loger, nourrir, enseigner de nouveaux disciples, non pour s'enrichir.
De nos jours, et en Occident, de semblables cycles et liens semblent difficiles. Toutefois, il convient que le Maître considère toujours qu'il enseigne gratuitement, et que le profit n'est pas le but de son enseignement.
Il convient aussi que le disciple ne considère pas qu'il " paye " le Maître, ni qu'il " achète " son enseignement, mais que, s'il verse des émoluments ou cotisations, ce sont de simples offrandes sans équivalence avec ce qu'il a reçu. Ainsi le Maître et le disciple restent libres et dignes, et ne sont liés que par la générosité, l'estime et la gratitude.
Le simple savoir pourrait, à la rigueur, s'acheter. Mais la formation et la connaissance, elles, sont sans prix. Le désintéressement et le détachement sont essentiels pour que naissent le courage, la loyauté, le dévouement pour un Maître, ou un idéal qui peut aller jusqu'au don de la vie. Notre vie ne vaut d'ailleurs d'être vécue que si on peut l'offrir à ce qui est plus grand qu'elle.
Le sens de l'honneur est fils de cette générosité totale, il est un des principes essentiels du BUSHIDO.